Les archéologues de l’Inrap ont mis au jour sur la commune de Sartène les vestiges d’un village datant de l’âge du Bronze exceptionnellement bien conservé. Réalisée sous le contrôle des services de l’État (Drac de Corse), cette opération archéologique vient renouveler les connaissances sur l’histoire de ce territoire, et de l’habitat 2000 ans avant J.-C.

Dernière modification
05 octobre 2021

Un village protégé

Implanté sur une colline dominant la rive gauche du fleuve Rizzanesi, dans la partie basse de sa moyenne vallée, à quelques kilomètres à l’ouest de son embouchure dans le golfe du Valincu, la plus importante baie du sud-ouest de la Corse, le site d’I Stantari di u Frati è a Sora a été fouillé entre novembre 2019 et janvier 2020, préalablement à l’aménagement d’un lotissement. Trois habitations ont été mises au jour et étudiées dans le cadre de cette opération. Elles s’insèrent au sein d’un espace fermé dont la superficie dépasse probablement l’hectare et comprend une douzaine d’habitations (estimées), formant un village fortifié. 


Les recherches archéologiques ont révélé une succession d’enceintes principalement sur le flanc sud de la colline, le plus vulnérable ; les autres versants, plus abrupts, semblent n’avoir fait l’objet que d’aménagements mineurs. L’absence de pierre sur le site paraît avoir initialement dicté la réalisation de systèmes défensifs « légers ». Ainsi, au Bronze ancien (vers 2000/1800 ans avant J.-C.), le village est protégé derrière plusieurs rangées de palissades. Ces structures sont par la suite démontées et remplacées par un fossé de section triangulaire, vraisemblablement doublé par une levée de terre agrémentée d’une palissade, autrement appelée merlon palissadé.


Vers le début du Bronze moyen (1500 ans avant notre ère), le creusement est comblé, et un double mur en pierres sèches est élevé, accueillant très probablement un mâchicoulis (balcon réalisé en surplomb), selon des normes alors généralisées à tout le sud de la Corse.

Fossé de section triangulaire.

Fossé de section triangulaire.

© P. Druelle, Inrap.




Des architectures de pierre, de bois et de terre

Remarquablement conservés, les vestiges des habitations ont livré de nombreuses informations. La découverte des tranchées d’implantation de chevrons du toit ainsi que la mise au jour des sablières permettent d’observer la structuration de l’espace interne des maisons. Divisées en trois pièces et limitées par un soubassement maçonné de pierre sèche, celles-ci s’étendent sur une superficie d’environ 50 m². L’étude montre aussi que certaines habitations étaient entièrement construites en bois.


Par ailleurs, les archéologues ont pu observer que l’économie de subsistance du village était basée sur l’exploitation céréalicole des alentours, sur la cueillette de glands et sur l’élevage. Les viandes étaient alors fumées pour être conservées pendant plusieurs mois. Des silos et des jarres ensilées (enterrées dans la terre) permettaient de stocker ces denrées. Enfin, l’artisanat se matérialise par une métallurgie discrète et par la présence de parures et vaisselles en pierre.
Ces découvertes offrent de nouvelles connaissances sur le quotidien des populations en Corse deux mille ans avant notre ère.

Équipement culinaire (meule et mortier) révélé au sein d'un habitat au cours de la fouille archéologique.

Équipement culinaire (meule et mortier) révélé au sein d'un habitat au cours de la fouille archéologique.

© P. Druelle, Inrap.


 

Aménagement : privé
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac de Corse)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Kewin Peche-Quilichini, Inrap